RSE – CSRD

Tout savoir sur la CSRD et le reporting extra-financier

Par Arthur Fournier, mis à jour le 25 octobre 2024

Rédacteur chez EFYB

La corporate sustainability reporting directive (CSRD) concernera à terme toutes les entreprises françaises sur critères de seuils afin de contribuer à davantage de transparence sur les impacts environnementaux et sociaux des entreprises dans le cadre des objectifs de développement durable.

Quelles entreprises sont concernées ? Quelles sont les nouvelles obligations ? Comment se préparer ? Nous répondons à ces questions en détails.

 

Se repérer dans les nouveaux textes avec un schéma

1. NFRD et CSRD : quels changements ?

a. Ce qui change avec la CSRD ?

La CSRD entrée en vigueur le 1er janvier 2024, vient remplacer la Non-Financial Reporting Directive (NFRD) pour laquelle les entreprises européennes et non européennes étaient déjà soumises pour les critères :

  • Plus de 500 salariés
  • Plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires
  • 25 millions d’euros de bilan

Alors que la NFRD obligeait les entreprises à communiquer annuellement sur leurs informations économiques, sociales et de gouvernance (ESG) au sein d’un rapport intitulé Déclaration de performance Extra-financière (DPEF), le texte n’imposait aucun indicateur précis ou format de publication harmonisé ce qui ne permettait pas de comparer les mesures environnementales et sociales entre les entreprises.

La CSRD touchera à terme plus de sociétés en incluant les PME européennes et non européennes cotées sur un marché réglementé européen. La publication d’un rapport durabilité répondra à une obligation de transparence en permettant aux entreprises de communiquer sur les mesures mises en œuvre et les résultats en faveur du développement durable.

 

« La CSRD vise un reporting plus exhaustif, transparent et comparable afin de diriger les acteurs économiques, consommateurs comme marchés financiers vers les entreprises les plus vertueuses. »
b. Qui est concerné ?

Au cours des prochaines années, la CSRD touchera plus de 50 000 entreprises européennes.

Alors que la NFRD concernait les entreprises de plus de 500 salariés, la CSRD concerne dès 2026 les grandes entreprises cotées en bourse ou non cochant au moins deux des critères :

  • 250 salariés
  • 40 millions d’euros de chiffre d’affaires
  • 20 millions d’euros de bilan

Il est à noter que ces seuils sont considérés comme dépassés à la date de clôture de deux exercices successifs, sur la base des derniers comptes annuels arrêtés.

De plus, la CSRD concerne également :

  • Les petites et moyennes entreprises (PME) cotées en bourse (à l’exclusion des micro-entreprises comptant moins de 10 employés) ;
  • Les entreprises non européennes dont le chiffre d’affaires annuel excède 150 millions d’euros sur le marché européen. Les filiales de ces groupes sont également tenues de rendre compte des pratiques RSE de leur société mère.

Pour les groupes ayant des filiales, les seuils mentionnés doivent être considérés au niveau consolidé si le groupe publie des comptes consolidés. Le reporting sera donc effectué au niveau de la société mère consolidée. Les filiales peuvent, dans ce cadre, être exemptées de cette obligation de reporting.

Cependant, elles doivent fournir certaines informations telles que : la déclaration d’exemption, les coordonnées de la société mère qui publie le rapport de durabilité, ainsi qu’un lien vers ce rapport consolidé. Cette exemption s’étend également aux filiales européennes de sociétés mères situées hors de l’UE, si celles-ci produisent un rapport de durabilité conforme à des normes équivalentes à celles exigées par la Commission européenne.

Il est important de noter que cette exemption ne s’applique pas aux grandes entreprises cotées en bourse, même si elles sont des filiales.

 

Voici un tableau récapitulatif des entreprises concernées selon les seuils :

c. Pourquoi la CSRD ?

Dans le contexte du réchauffement climatique, il est indéniable que les entreprises ont un impact significatif sur l’environnement. Cependant, au-delà de ce constat, elles doivent également être perçues comme des actrices clés ayant un fort potentiel d’action. C’est pourquoi la question ne se limite plus seulement à l’évaluation de leur impact, mais à leur capacité à adopter des comportements alignés sur les principes de durabilité.

La CSRD et la taxonomie verte européenne imposent aux entreprises de réviser leurs modèles d’affaires. L’objectif est de s’assurer qu’elles contribuent activement à la limitation du réchauffement climatique tout en prenant en compte les limites planétaires.

Si beaucoup craignaient que ces adaptations puissent nuire à leur compétitivité ou à leurs parts de marché, ces nouvelles directives ont pour effet de placer toutes les entreprises sur un pied d’égalité en matière de conformité réglementaire. Toutefois, l’effort requis variera d’une entreprise à l’autre, selon les spécificités sectorielles et contraintes particulières.

Finalement, anticiper ces enjeux devient une stratégie essentielle pour se préparer aux nouvelles exigences, plutôt que de chercher à les éviter. De plus, les exigences de reporting (basées sur les ESRS) différeront selon l’analyse de double matérialité propre à chaque entreprise, une approche expliquée plus en détail en section 2.

 

d. Certification du rapport : risques et sanctions

Un rapport de durabilité devra être communiqué au format XHTML aux mêmes destinataires que ceux du rapport de gestion :

  • Les différentes parties prenantes internes et externes de l’entreprise (salariés, actionnaires, fournisseurs, clients…)
  • European Single Access Point (ESAP)
  • Greffe du tribunal de commerce

Ce rapport de durabilité devra être vérifié par :

Les OTI devront recevoir une accréditation délivrée par le COFRAC (Comité français d’accréditation). Les auditeurs seront tenus de suivre une formation de 90 heures portant sur les pratiques d’audit et les enjeux ESG.

De plus, la supervision des auditeurs sera assurée par la H2A (Haute Autorité de l’Audit), qui remplace le H3C (Haut Conseil du Commissariat aux Comptes).

 

Le non-respect des obligations de reporting de la directive CSRD est assorti de plusieurs sanctions en France :

Non-conformité Sanction Texte législatif  
Défaut de nomination d’un commissaire au compte (CAC) ou organisme tiers indépendant (OTI) Amende de 30000 euros, sanction assortie de 2 ans d’emprisonnement pour le dirigeant ou personne physique Article L 821-6 – code de commerce
Défaut de publication des informations de durabilité dans le rapport de gestion annuel Amende de 3750 euros, assortie de la peine complémentaire de diffusion de la décision Article L 233-28-3 code de commerce et 131-39 code pénal
Obstacle aux vérifications ou contrôles des auditeurs des informations en matière de durabilité ou de leurs experts Amende de 75000 euros assortie de 5 ans d’emprisonnement pour le dirigeant personne physique Article L 822-40-2 code de commerce
Publication d’informations fausses ou erronées, en particulier si elles sont certifiées Amende de 3750 euros assortie de la peine complémentaire de diffusion de la décision Article L 233-28-3 code de commerce et L131-39 code pénal

 

Au-delà des risques à ne pas se conformer correctement à la CSRD, c’est aussi passer à côté d’un nouvel outil de pilotage basé sur des indicateurs diversifiés liant une lecture financière et extra-financière. D’ailleurs, les entreprises avancées constatent de nombreux bénéfices comme des économies financières, une amélioration de leur compétitivité, de leur attractivité et de leur rétention des talents.

 

2. Mise en application de la CSRD : comment faire ?

a. Les ESRS comme cadre

Les European Sustainability Reporting Standards (ESRS) sont les normes européennes pour l’exercice de reporting. Ils sont au nombre de 12, répartis-en 3 grandes thématiques ESG (Environnement, Social et Gouvernance).

Seules les ESRS dits « General Disclosures » sont obligatoires pour toutes les entreprises, tandis que la nécessité des autres ESRS sera déterminé par votre analyse de double matérialité qui définira lesquels concernent votre entreprise. Cependant, il convient de ne pas perdre de vue que la double matérialité sera vérifiée par un tiers CAC ou OTI comme un cabinet de conseil en RSE.

 

Ces normes amélioreront l’harmonisation des déclarations extra-financières des entreprises européennes. L’EFRAG a été désigné par la commission européenne pour conseiller sur la conception et l’application de ces normes.

 

b. La double matérialité pour déterminer ses obligations

La double matérialité consiste à évaluer les impacts des activités d’une entreprise sur l’environnement et la société, et réciproquement les risques auxquels une entreprise est exposée.

  • Une lecture sur les conséquences des activités de l’entreprise sur la société et l’environnement (matérialité d’impact)
  • Une autre lecture sur les impacts de la société et de l’environnement sur la performance financière (matérialité financière)

 

Exemple de représentation d’une matrice de double matérialité simplifiée

Les ESRS identifiés comme matériels sont alors à traiter par l’entreprise dans le cadre du rapport de durabilité. Par exemple, pour se dispenser l’« ESRS 1 – Changement climatique » il conviendrait de démontrer que l’entreprise n’est pas concernée par l’évolution du climat ce qui paraît peu probable.

 

 c. Les indicateurs extra-financiers à renseigner
    • Les indicateurs carbone

L’évaluation de l’impact carbone avec de nouveaux indicateurs concerne majoritairement l’ESRS 1, à ce titre l’entreprise devra pouvoir documenter ses émissions de gaz à effet de serre actuels et une trajectoire de transition bas carbone. En France, le diagnostic Décarbon’action subventionné par BPI France et l’Ademe peut contribuer à la collecte de données et la formalisation d’un plan d’action.

  • Les indicateurs de ressources 

D’autres indicateurs sur les flux d’énergies, matières, eau ou encore déchets compléteront la photographie de l’entreprise afin de pouvoir justifier également les trajectoires adoptées. En France, le diagnostic Eco-Flux subventionné par BPI France et l’Ademe peut contribuer à la collecte de données et la formalisation d’un plan d’action.

  • Les exigences de divulgation sur la gouvernance

L’ESRS 2 oblige à la formalisation de la gouvernance, incluant entre autres le rôle des organes d’administration, de gestion et de surveillance ; les impacts, risques et opportunités significatifs et leur interaction avec la stratégie et le business model etc.  Un accompagnement RSE peut être utile pour amorcer ce travail réflexif par exemple dans le cadre d’un RSE Start.

 

3.Conseils et points de vigilance

a. Rapprocher la fonction RSE et la fonction comptabilité / contrôle de gestion

Les services de comptabilité sont historiquement rompus à l’exercice de reporting financier qui trouve des points de similitude avec le reporting extra financier tant sur les principes d’image fidèle, de prudence ou de caractère auditable, c’est d’ailleurs pour cette raison que les commissaires aux comptes sont habilités à vérifier les données produites par l’entreprise dans le cadre de la CSRD.

Aussi, l’identification d’indicateurs communs permet de transformer les données ESG en nouveaux ratios financiers mixtes utiles au pilotage de la performance globale. Faire converger les objectifs de ces deux fonctions implique que la RSE ne soit plus un « silo » mais un axe transversal intégré dans les prévisions budgétaires et les bilans annuels.

 

b. Un reporting ou un outil de pilotage stratégique ?

Bien que le reporting soit indispensable pour répondre aux exigences légales, et qu’il soit souvent perçu comme une formalité administrative. Ce processus est une occasion stratégique de démontrer la crédibilité des engagements ESG et de renforcer l’image responsable de l’entreprise sans verser dans le greenwashing ou socialwashing. En ce sens, le reporting peut se transformer en un véritable outil de pilotage stratégique lorsqu’il est intégré par le top management.

Bien que rétrospectif par définition, le reporting évolue dans le cadre de la CSRD avec une dimension prospective autour d’objectifs à long terme. Cet exercice inhabituel propose de projeter les objectifs de développement de l’entreprise en incluant les risques et opportunités liés au changement climatique. C’est lorsque ce travail est mené à partir d’indicateurs pertinents qu’il vient à délivrer toute sa valeur ajoutée pour influencer positivement les orientations stratégiques et leurs déclinaisons opérationnelles.

 

 c. Quelles aides existent ?

Il sera nécessaire d’attendre quelques années de recul afin de pouvoir simplifier ce nouveau reporting extra-financier et le rendre moins déstabilisant quand on pense aux près de 1200 « data points » qui doivent être envisagés (sous forme d’un fichier XBRL à remettre sur le site de l’ESAP).

En conséquence, les allégations de certains outils sur la facilitation du reporting doivent être prises avec précautions afin de préserver le discernement que peut compromettre l’automatisation excessive du traitement.

Aussi, il est possible d’anticiper la production de “matériaux” nécessaires comme la réalisation d’un bilan carbone, incontournable pour répondre à l’ESRS 1 entre autres.

 

Pour simplifier votre travail, nous proposons :
  • Un logiciel de collecte de vos données, de traitement et de mise en forme au sein d’un rapport de durabilité
  • Nos consultants pour co-construire une stratégie bas carbone, former vos équipes et conduire les changements nécessaires
  • Des ressources documentaires pour guider votre mise en conformité et concrétiser votre engagement grâce à l’appui de nos consultants RSE-CSRD

4. Conclusion

La CSRD représente un véritable “game changer” dans les exigences de transparence imposées aux entreprises. Bien que récente, cette réglementation est vouée à évoluer, ce qui doit être pris en compte pour rentabiliser les investissements en temps et en ressources.

Dès lors, la meilleure stratégie est d’anticiper ces évolutions en évaluant dès maintenant les risques et opportunités de ses activités à travers le prisme des critères ESG.

Une première étape judicieuse consiste à réaliser son bilan carbone afin de gagner du temps.

Enfin, s’inspirer des retours d’expérience d’autres entreprises et de consultants spécialisés permettra de mieux comprendre les enjeux et de définir une roadmap solide face aux défis à venir.

 

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